La loi asile et immigration adoptée le 19 décembre 2023 par le parlement français et soumise au Conseil constitutionnel le 26 décembre 2023 inaugure un tournant quant à l’insertion des migrants dans la société française. Cette dernière modifie ainsi le code du travail en changeant ou en ajoutant des mesures qui couvrent un large éventail de domaines, de l’établissement de quotas migratoires au durcissement des conditions du regroupement familial, en passant par des ajustements dans l’accès à certaines allocations et des mesures sur l’intégration, le séjour et les demandeurs d’asile.
L’une des questions phares qui a suscité des débats houleux entre les différentes forces politiques, est celle de la durée de résidence minimale nécessaire pour que les étrangers non-européens en situation régulière puissent bénéficier des prestations sociales. Selon les mesures adoptées, les personnes étrangères devront vivre en France durant une période de 5 ans afin de pouvoir bénéficier de l’aide personnalisée au logement (APL).
Cependant, ces mesures ne s’appliquent pas aux travailleurs étrangers qui ont travaillé plus de 3 mois en France ou aux personnes ayant un visa étudiant.
De plus, les allocations familiales, l’allocation personnalisée d’autonomie et le droit au logement opposable seront-elles aussi accessibles après une période de 5 ans en France, excepté si le demandeur travaille depuis 30 mois. Cependant, ces dispositions ne concernent pas les réfugiés, apatrides et les détenteurs d’une carte de résident (de dix ans), ni l’allocation enfant handicapé et la prestation de compensation du handicap. En outre, la suppression de l’aide médicale d’État (AME) ne figure pas dans le texte adopté.
Pour une première demande de carte de séjour pluriannuelle, la loi asile et immigration exige une connaissance minimale de la langue française au niveau A1 du CECRL (Cadre Européen commun de référence pour les langues). Par ailleurs, pour l’obtention de la carte résident et pour l’accès à la nationalité française, le niveau a été relevé et est attendu aux niveaux B1 et B2.
D’autre part, les conditions du regroupement familial changent. La durée de séjour exigée de la personne étrangère pour faire venir sa famille en France est portée à une durée de 18 à 24 mois et requiert un niveau minimal de français du conjoint rejoignant, devant être acquis avant son entrée en France. La loi asile et immigration rétablit le délit de séjour qui aura pour conséquence une amende de 3.750 euros et d’une interdiction du territoire de 3 ans.
Toutes les personnes étrangères qui demandent une carte de séjour devront s’engager à respecter les principes de la République par la signature d’un nouveau contrat (liberté d’expression et de conscience, égalité femmes-hommes, devise et symboles de la République…) l’exclusion de l’un de ces principes auront pour fait, le refus, le retrait ou le non-renouvellement du titre de séjour.
Les enfants nés en France de parents étrangers deviendront Français à leur majorité en manifestant leur volonté. Cependant, le droit du sol de ces enfants est écarté en cas de condamnation définitive pour crime.
Les étudiants étrangers doivent émettre un dépôt de caution retour (dont le montant sera fixé par décret) afin d’obtenir un titre de séjour, cette caution sera restituée à l’étudiant. De plus, l’Etat prévoit des exceptions en cas de précarité des revenus et d’excellence du parcours scolaire.
En parallèle, les personnes détenteurs de deux nationalités (acquis par naturalisation, manifestation de volonté, mariage, effet collectif…) se verront retirer leur nationalité française en cas de condamnation définitive pour homicide volontaire sur personne dépositaire de l’autorité publique. De plus, les refus de renouvellement, retrait et non-renouvellement du titre de séjour sont revues en cas de fraude documentaire, infractions commises contre des élus ou des agents publics… Les personnes ayant un titre long se voient dans l’obligation de rester six mois par an sur le territoire français.
D’importantes modifications sont effectuées au niveau des demandeurs d’asile et des cas contentieux des étrangers en France. Ces changements incluent la mise en place progressive de pôles territoriaux appelés « France Asile », qui remplaceront les guichets uniques d’accueil des demandeurs d’asile (GUDA). Ces derniers, auront pour fonction l’enregistrement des demandes d’asile, la gestion des droits par l’Office français pour l’immigration et l’intégration (OFII) et la transmission des demandes à l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA).
De plus, des ajustements visent à simplifier et à accélérer la procédure contentieuse concernant le contexte des affaires d’asile. Ainsi, l’organisation de la Cour nationale du droit d’asile (CNDA) se verra réformée avec la création de chambres territoriales et l’adoption généralisée du juge unique. Ces mesures viennent également réduire de 12 à 3, le nombre des différents types de procédures contentieuses possibles.
La loi asile et immigration met en place une aide pour les travailleurs sans papiers exerçant dans des métiers en tension qui pourront accéder à titre exceptionnel à la délivrance d’un titre de séjour « travailleurs temporaires » ou « salariés ». Les travailleurs ne sont plus dans l’obligation de passer par leurs employeurs pour solliciter ce titre. De plus, une carte de séjour pluriannuelle sera délivrée aux praticiens diplômés hors union européenne nommés « talent – profession médicale et de la pharmacie » afin de répondre à la demande de personnel dans les hôpitaux et les établissements médico-sociaux.
La loi d’immigration lutte contre le travail illégal en accordant l’accès au statut d’auto-entrepreneur qui permet la détention d’une carte autorisant à travailler. En outre, un renforcement des sanctions est mis en place pour lutter contre les entreprises employant des travailleurs irréguliers.
De surcroît, les employeurs qui recrutent du personnel issu de l’immigration et non détenteur de la nationalité française doivent promouvoir l’intégration des immigrants dans la société française, notamment par le biais de programmes d’apprentissage de langue et de la culture.
Ainsi, les employeurs doivent dans un premier temps, proposer, à leurs salariés allophones, des formations visant à atteindre un niveau de connaissance de la langue française qui sera déterminé par décret. Dans un second temps, il est imposé que les employeurs considèrent le temps de formation du français langue étrangère (FLE)comme du temps de travail effectif pour les salariés allophones ayant signé un contrat d’intégration républicaine (CIR) et engagés dans une formation linguistique. Enfin, pour ces derniers il est également prévu que leurs employeurs accordent une autorisation d’absence pour participer aux formations de FLE.
Les mesures d’éloignement, qui sont des précautions administratives qui peuvent être prises par l’Etat notamment en vue d’une expulsion, se trouvent facilitées. Elles incluent « l’expulsion des étrangers réguliers, même présents depuis longtemps en France ou y ayant des liens personnels et familiaux, condamnés notamment pour des crimes ou délits passibles d’au moins cinq ou trois ans de prison ou « impliqués dans des violences contre des élus ou des agents publics ». Ce sont les juges qui pourront prononcer l’interdiction du territoire français (ITF). Les charges quant aux assignations à résidence des étrangers frappés d’une expulsion, d’une peine d’ITF ou d’interdiction administrative du territoire seront à leur frais.
En conclusion, les mesures mises en place par la loi d’immigration sont diverses, allant des quotas migratoires au durcissement des conditions d’accès aux prestations sociales.
L’un des points centraux de cette réforme est la nécessité pour les personnes étrangères d’apprendre et de maîtriser le français. Cette obligation se fait non seulement dans l’optique d’obtenir un titre de séjour, mais également, s’associent dans les obligations aux employeurs de fournir à leurs employés une formation au français langue étrangère (FLE). Il est ainsi recommandé aux personnes concernées de se former au FLE auprès d’organismes de formation certifiés Qualiopi. Cette évolution souligne la volonté des autorités françaises de favoriser une intégration réussie.
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